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les représentants des dentistes font capoter l’amendement sur le mercure dentaire

montage CP_commun_mercureLes sénateurs ont rejeté cette nuit l’amendement proposé par le groupe Europe Écologie Les Verts et défendu par Aline Archimbaud, instaurant une taxe prohibitive sur le mercure dentaire [1].

La Commission des affaires sociales a reconnu que cet amendement pose « une question importante en termes de santé publique » ; mais, compte tenu de la complexité du sujet, elle a préféré s’en remettre à l’avis du gouvernement.

Celui-ci, représenté par le ministre du Budget Bernard Cazeneuve, a mentionné que la France « s’est engagée à réduire sa consommation de mercure » ; il a toutefois donné un avis défavorable à ce texte, qui aurait permis une réduction drastique et immédiate de l’usage des amalgames dentaires, au motif qu’un processus graduel de diminution, déjà enclenché, devrait se poursuivre dans le cadre de conventions avec l’Association Dentaire Française (ADF) en vue d’une élimination envisagée à l’horizon 2020. Les sénateurs communistes ont avancé une autre thèse pour refuser cet amendement : les amalgames seraient irremplaçables « pour les pays pauvres et pour les pauvres de nos pays » car, leur a-t-on fait croire, la seule alternative résiderait dans les coûteux inlays en céramiques, inaccessibles aux plus modestes.

Quelque habitués que nous soyons aux campagnes de désinformation des représentants des dentistes, nous nous étonnons de voir jusqu’où ils poussent ici le mensonge quand ils dispensent leurs avis aux élus de la République.

Ainsi :

alors que les trois types de matériaux d’obturation (amalgames dentaires, résines, ciments verres ionomères) ont la même cotation pour la Sécurité sociale et que la substitution de l’un par l’autre ne modifie en rien le coût pour le patient ;
alors que l’ANSM admet que les amalgames dentaires sont remplaçables dans tous les cas par les autres matériaux d’obturation [2] ;
alors que de nombreux dentistes en France se passent totalement de mercure, parfois depuis des décennies [3] ;
alors que le mercure dentaire se voit déjà interdit dans des pays comme le Zimbabwe, la République Dominicaine ou l’Arménie (pour ne citer que quelques-uns des pays où le niveau de vie n’est pas, que nous sachions, particulièrement élevé)…

… les propagandistes de l’amalgame sont parvenus à persuader les sénateurs CRC, dont nous ne mettons pas ici en cause la bonne foiqu’il n’existe rien d’autre pour les pauvres que ce matériau inesthétique et toxique [4].

L’Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD), l’ADF et le syndicat de dentistes majoritaire CNSD n’ont jamais reculé devant des arguments fallacieux, voire totalement faux, ni devant des valeurs erronées pour faire croire aux praticiens que l’amalgame ne poserait aucun problème de santé publique [5], ce qui a conduit notre pays à devenir le premier consommateur d’amalgames en Europe et peut-être le seul endroit au monde où l’on recommande l’usage de ce matériau neurotoxique pour soigner les enfants, dont le système nerveux est en développement.

Il y a un an, l’ONCD et l’ADF priaient encore la ministre de la Santé d’épargner les amalgames dentaires de la stratégie de réduction générale du mercure [6].

Certes, l’usage du mercure dentaire diminue, mais ce n’est certainement pas grâce à ces organisations : la baisse constatée résulte d’abord du fait que tous les praticiens ne sont pas dupes des imaginations ordinales, ainsi que de la préférence bien compréhensible des patients pour des matériaux dentaires modernes et moins toxiques pour leur santé. En vérité, à la faveur des crispations des instances dentaires et en dépit de cette réduction spontanée de l’usage du mercure dans les soins dentairesune obturation sur quatre en France se fait encore à l’amalgame [7] – une proportion considérable, très largement supérieure à ce qu’on observe dans les pays ayant adopté une dentisterie moderne.

Aussisupposer aujourd’hui que la consommation de mercure dentaire va diminuer de manière significative grâce à la seule bonne volonté d’organisations dentaires archaïques et mensongères nous apparaît comme un pari pour le moins hasardeux.

 

[1]. L’amendement se trouve à cette page :http://www.senat.fr/amendements/2013-2014/117/Amdt_273.html. Pour davantage de détails sur la légitimité de cet amendement, voir : http://reseau-environnement-sante.fr/2013/11/12/dossiers-par-themes/communique-de-presse-12-nov-2013-un-amendement-pourrait-signer-le-debut-de-la-fin-du-mercure-dentaire/


[2]. « Au cours de l’enquête menée auprès des fabricants de produits d’obturation dentaire, il n’a pas été identifié d’indication de restauration où l’amalgame ne pourrait être remplacé par un autre matériau. De plus, l’utilisation d’une technique indirecte, notamment avec des matériaux incrustés, constitue une alternative à considérer. »

[3]. http://www.procontremercure.lautre.net/Lettre-ouverte-de-chirurgiens.html


[4]. De fait, c’est la situation actuelle qui s’avère extrêmement discriminanteet qui fait peser sur les pauvres une double peine. En Franceles inégalités sociales pèsent très lourdement sur la santé bucco-dentaire : non seulement les plus défavorisés sont nettement plus affectés par la maladie carieuse que les populations aisées, mais ils se voient de surcroît prioritairement soignés avec l’amalgame dentaire qui, selon l’OMS, induit la majorité des effets secondaires dus aux matériaux dentaires, y compris des problèmes généraux de santé.

http://www.drees.sante.gouv.fr/sante-bucco-dentaire-des-enfants-des-inegalites-des-le-plus,11172.html
http://www.non-au-mercure-dentaire.org/actualites-non-au-mercure.php?article=159


[5]. http://www.non-au-mercure-dentaire.org/actualites-non-au-mercure.php?article=161
http://www.non-au-mercure-dentaire.org/actualites-non-au-mercure.php?article=162
http://www.non-au-mercure-dentaire.org/actualites-non-au-mercure.php?article=194


[6]. http://www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr/lordre/la-lettre-de-lordre/detail-la-lettre-de-lordre.html?tx_ttnews[tt_news]=350&cHash=7e3778874d6a2c377b85151587c9f9ee


[7]. Selon les données de l’ANSM qu’a par ailleurs exploitées M. Bernard Cazeneuve durant son exposé au Sénat.